Ker-Xavier Roussel
Lorry-lès-Metz, 1867 – L’Etang-la-Ville, 1944
Silène ivre
Pierre noire et gouache
120 x 170 mm
Signé en bas à droite : Roussel
Exposition
Roussel, Kiko Galleries, Houston, 1968, n°108[1]
Ami de Vuillard depuis ses études au lycée Condorcet à Paris, Ker-Xavier Roussel devient élève de l’académie Julian où il rencontre ceux avec qui il formera le groupe des Nabis : Bonard, Denis, Ranson, Sérusier. Mais, à l’acceptation de la réalité contemporaine prônée par ses disciples, son imagination préfère bientôt un univers plus spirituel et plus poétique. Ainsi, à partir de 1901, Roussel expose au Salon des Indépendants des scènes mythologiques peuplées de nymphes et de faunes, hautes en couleurs et très décoratives. Après 1905, ayant soif de grands espaces, Roussel découvre avec émerveillement les ciels sans nuage de la Méditerranée. Sa palette s’éclaircit et la plupart de ses fantaisies mythologiques prennent désormais un aspect édénique, qui, dès lors, les rattache davantage au mouvement symboliste qu’à celui des Nabis.
Ce dessin est un excellent exemple de manifestation du paysage « arcadien idyllique » auquel Roussel consacre son oeuvre à partir du début du XXe siècle. Il rejoint à sa manière les idées de ses amis Cross, Signac et Luce pour la peinture, ou Mallarmé, Debussy et Valéry pour la littérature et la musique, qui tous rêvent d’un âge d’or dans lequel le progrès doit libérer l’homme de la servitude et le rapprocher de la nature. Le recours à des sujets bouffons tel Silène endormi, sujets peu illustrés au temps de Roussel, montre également l’importance de la littérature pour Roussel. Fervent lecteur de Virgile et Ovide, Roussel, en tant membre du groupe d’intellectuels et d’artistes réunis dans les années 1890 autour de la Revue Blanche avait sûrement connaissance des idées de Nietzsche développée dans La Naissance de la Tragédie. Roussel cherche ici à montrer l’exubérance des passions cachées sous l’apparente sérénité de l’art antique et s’attache à traduire l’énergie vitale cachée sous les thèmes les plus rebattus de l’art classique.
[1] étiquette des Kiko Galleries avec l’annotation « Galerie Paul Vallotton S.A. / 9882 / Lausanne / KIKO 108 (1968) » au verso de l’ancien montage