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Louis Hersent

Paris, 1777 – 1860

 

Las Cases soigné par des Incas, 1827

 

Huile sur toile

24,5 x 33 cm

Signé et daté en bas à droite : Hersent / 1827

 

Œuvre en rapport

Reprise du tableau exposé au Salon de 1808, conservé en collection particulière

 

 

Formé auprès de Jean-Baptiste Regnault, Louis Hersent remporte en 1797 le second prix de Rome derrière Pierre-Narcisse Guérin mais doit renoncer l’année suivante au voyage à Rome à cause de sa santé fragile. Hersent fait ses débuts au Salon en 1804 avec Achille livrant Briséis aux hérauts d’Agamemnon. Aux scènes classiques s’ajoutent bientôt les sujets littéraires comme Atala s’empoisonnant dans les bras de Chactas, d’après Chateaubriand, qui lui vaut, deux ans avant le chef-d’œuvre de Girodet, une médaille d’or au Salon de 1806. Il illustre aussi des scènes de l’histoire contemporaine, Le Passage du pont de Landshut (Salon de 1810, Versailles, musée du Château) ou Louis XVI distribuant des bienfaits aux pauvres pendant le rigoureux hiver de 1788 (Salon de 1817, Versailles, musée du Château), véritable icône de la Restauration. Pour le Palais-Royal, le duc d’Orléans lui commande L’Abdication de Gustave Wasa qui fait sensation au Salon de 1819. Comblé d'honneurs par la Restauration, Hersent garde ses bons rapports avec la Monarchie de Juillet, dont il reçoit la commande de nombreux tableaux d'histoire, tout en se convertissant aux portraits officiels (Portraits en pied de Louis-Philippe, de la reine Marie-Amélie, du duc de Montpensier) et de maintes personnalités de l'époque (Casimir Périer, Delphine Gay). Élu membre de l’Académie des Beaux-Arts en 1822, Hersent prend trois ans plus tard la succession d’Anne-Louis Girodet comme professeur à l’École des Beaux-Arts. En 1821, le peintre épouse l’artiste Louise Mauduit avec laquelle il ouvre un atelier privé réservé aux femmes dans leur domicile parisien du 22 rue Cassette.

 

Au Salon de 1808, Hersent expose un étrange sujet, Las Casas malade soigné par des Incas (collection particulière, fig. 1)[1]. Cette œuvre est inspirée du roman intitulé Les Incas ou la destruction de l’empire du Pérou publié en 1777 par l’encyclopédiste, grammairien et poète Jean-François Marmontel (1723-1799). L’ouvrage tourne autour du prêtre espagnol Bartolomé de Las Casas (1474 ou 1484-1566), missionnaire dominicain, est resté célèbre pour avoir défendu les droits des Amérindiens durant la colonisation espagnole. L’ecclésiastique est entouré de personnages fictifs comme Cora, une jeune Inca et Alonso, un beau conquistador espagnol dont elle est amoureuse. L’ouvrage de Marmontel connait un succès retentissant lors de sa publication dans toute l’Europe, sauf en Espagne où il est interdit par l’Inquisition.

 

Pour son tableau, Hersent met en valeur la piété filiale et la fidélité conjugale d’un couple d’Incas. Inspiré par Marmontel, l’artiste imagine le missionnaire nourri au sein par une mère qui a perdu son enfant : « Écoute, ajouta le sauvage en soulevant sa tête, ils disent que tu es attaqué d’une maladie à laquelle le lait de femme est salutaire. Je t’amène ici ma compagne. Elle a perdu son enfant ; elle a pleuré sur lui ; elle a baigné du lait de ses mamelles la poussière qui le couvre ; il ne lui demande plus rien. La voilà. Viens, ma femme, & présente à mon père ces deux sources de la santé »[2]. Plongé dans la pénombre d’une pièce éclairée par une unique bougie, le vieux prêtre est allongé, visiblement souffrant, sur un lit. Au centre, l’épouse du chef indien tend son sein vers la bouche du malade pour l’allaiter. Véritable transposition exotique du thème classique de la charité romaine, l’œuvre est alors très remarquée par la critique qui salue la qualité de l’œuvre et la haute valeur morale du sujet. Le succès remporté par cette œuvre a entrainé la réalisation d’estampes mais également de répétitions autographes, comme notre œuvre, signée et datée 1827. Dans notre peinture, Hersent a introduit un certain nombre de variantes, notamment dans la nature morte du premier plan et ajoute d’un grand rideau qui cache la source lumineuse et la Vierge à l’Enfant au mur.

 


[1] Huile sur toile, 53,8 x 64,6 cm (Peintures du XIXe siècle, Paris, Galerie La Nouvelle Athènes, automne 2022, n°6).

[2] J.-F. Marmontel, Les Incas ou la destruction de l’empire du Pérou, Paris, 1777, vol. II, chap. XLIII, p. 225-226.



 
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