Jean-Thomas Thibault
Moutier-en-Der, 1757 – Paris, 1826
Paysage avec une fontaine et Paysage avec un tombeau, vers 1795-1800
Huiles sur toile
Chaque 24,5 x 33 cm
Le premier monogrammé en bas à gauche : J.T.T., le deuxième monogrammé en bas à droite : J.T.T.
Jean-Thomas Thibault reçoit une première formation de peintre à l’École gratuite de dessin. Mais, après avoir été dessinateur et inspecteur de travaux pour le prince de Conti, il gagne le concours de l’Académie d’architecture en 1778 et entre dans l’agence de l’architecte Étienne-Louis Boullée. En 1788, il décide de se rendre, à ses frais, en Italie et séjourne à Rome jusqu’en 1792. À son retour à Paris, Thibault entame une double carrière de peintre et d’architecte : associé avec Jean-Nicolas-Louis Durand, il présente des projets d’architecture au concours de l’an II tout en exposant plusieurs paysages aux Salons de 1795 et 1796. Très lié avec Percier et Fontaine, rencontrés lors du séjour romain, Thibault participe, avec quatre peintures, à la réalisation du fastueux cabinet de platine, commandé par Charles IV d’Espagne en 1804 pour la Casa del Labrador à Aranjuez. Proche de la famille Bonaparte, Thibault va travailler pour Joséphine (parc de la Malmaison, 1805), pour les Murat (décors pour le château de Neuilly et le palais de l’Élysée, 1806) mais surtout pour Louis Bonaparte, qu’il accompagne à Amsterdam lorsque ce dernier devient roi de Hollande (travaux au château de Saint-Leu, dans l’hôtel de la rue Cerutti, actuelle rue Laffitte, à Paris, puis au palais royal de La Haye et à l’hôtel de ville d’Amsterdam). Les dernières années de Thibault sont consacrées à l’enseignement : devenu professeur de perspective à l’École des beaux-arts en 1819 en remplacement de Pierre-Henri de Valenciennes, il prépare un traité, Application de la perspective linéaire aux arts du dessin, qui sera publié un an après sa disparition, en 1827.
Avec ses amis Percier et Fontaine, Thibault fait partie des rares architectes-artistes capables de réaliser des dessins ou des peintures indépendamment de leur art de constructeur. C’est durant la période révolutionnaire, alors qu’il se trouve sans ressources, que l’artiste réalise l’essentiel de son œuvre de paysagiste. Si l’on connaît un petit ensemble de dessins de Thibault, essentiellement des vues d’Italie ou de Paris et ses environs, ses peintures sont nettement plus rares. Dans le premier de nos deux paysages, un personnage vêtu d’une toge, assis dans la campagne, contemple une fontaine : une naïade couchée sur un bloc de pierre gravé d’une inscription latine. Dans le fond, d’autres personnages viennent de passer un pont en dos d’âne et s’éloignent le long d’un mur couvert de végétation. Dans le second tableau, un autre personnage vêtu à l’antique semble pleurer devant un tombeau. En arrière-plan, une colonne au chapiteau corinthien, surmontée d’une statue, se détache sur un fond boisé. Ces deux œuvres relèvent d’un même esprit, l’évocation mélancolique du pays mythique d’Arcadie, monde disparu où l’homme vivait heureux au milieu des ruines dans une nature bienveillante. Nos peintures doivent beaucoup à l’art de Nicolas Poussin et de Claude Gellée mais aussi à l’art de contemporains de Thibault comme Achille-Etna Michallon ou Pierre-Henri de Valenciennes. Nous retrouvons chez Thibault la même attention à l’étagement des plans, à la représentation des variétés du feuillage, aux effets de lumière. Mais on reste frappé par la grande clarté des compositions : toute la rigueur du futur professeur de perspective se perçoit ici.