Nicolas-Antoine Taunay
Paris, 1755 – 1830
L’Arracheur de dents, vers 1780-1790
Gouache
Diamètre 75 mm
Encadrement en bronze doré émaillé
Provenance
Paris, galerie Charpentier, 15 décembre 1938, n°26
Bibliographie
C. Lebrun-Jouve, Nicolas-Antoine Taunay, 1755-1830, Paris, 2003, p. 341, n°P.1205
Fils d’un orfèvre-chimiste, Nicolas-Antoine Taunay entre de 1768 à 1772 en apprentissage chez Nicolas-Bernard Lépicié, peintre d’histoire converti à la scène de genre. Après avoir suivi l’enseignement de Nicolas-Guy Brenet, chez qui il perfectionne sa maîtrise de la figure humaine, il travaille auprès de Francesco Casanova, peintre de bataille. Son voyage en Suisse de 1776 a eu une influence fondamentale sur sa conception de la structure du paysage. Ce cursus a fait de Taunay un peintre complet dont la production échappe aux traditionnelles hiérarchies des genres. Agrégé comme peintre de paysage en 1784, il part pour l’Italie la même année, avec le soutien de Jean-Baptiste-Marie Pierre, Premier peintre du roi. A Rome, Taunay délaisse les antiques au profit des études de paysages et de lumière, qu’il effectue aux côtés de Jacques-Louis David. Revenu en France en 1787, Taunay peint des paysages et des scènes bibliques, à la fois italianisante et dans le goût de Poussin, tout en s’inspirant des peintres de genre hollandais de la fin du XVIIe siècle, comme Adriaen van der Werff. Membre de l’Institut dès sa création en 1795, c’est sous le Consulat, puis sous l’Empire, que la carrière de Taunay est la plus brillante. Il illustre les campagnes de Napoléon et peint dix-huit tableaux pour la galerie de Diane aux Tuileries. Après la chute de Bonaparte, l’artiste, craignant pour sa carrière, décide de participer à la mission décidée par Jean VI du Portugal et de part fonder un institut des Beaux-Arts à Rio de Janeiro. Il y restera jusqu’en 1820, avant de rentrer en France suite aux problèmes de financement de l’institut brésilien.
La riche production de Taunay comprend surtout des paysages animés de petites figures dont il s’était fait une spécialité et qu’il improvisait brillamment. Dans sa première période, antérieure à son voyage à Rome, l’artiste affectionne les tableautins de goût hollandais, à sujets anecdotiques, comprenant parades, bateleurs ou charlatans. Notre miniature s’inscrit tout à fait dans cette production. Elle nous présente un arracheur de dents dans un riche costume turc. Monté sur des tréteaux où il exerce publiquement son art, il exhibe d’une main une dent qu’il vient d’arracher avec la pointe d’un sabre qu’il tient de la main gauche. Il semble dire aux différents spectateurs qui le regardent : « Sans douleur ! messieurs, sans douleur » ! Mais le patient dont il vient d’ébranler la mâchoire montre clairement par ses grimaces et ses horribles contorsions, que le discours du charlatan ne s’accorde pas avec ses souffrances. On retrouve au premier plan les élégantes silhouettes typiques de Taunay, qui, tournant le dos au spectateur, comme des acteurs qui n’auraient pas vu le rideau levé, donnent à l’ensemble une note de naturel et d’instantanéité.